lundi 26 août 2013

Truth in 24 … Biking

 24 août 2013, ma 2ème participation aux 24H vélo en solo sur le circuit mythique du Mans : « le Bugatti »

L’an passé, j’étais trop impatient, trop fougueux… Après un excellent 1er tour de cadran, je voyais le temps s’allonger, tour après tour jusqu’à l’arrivée. Mais aucune embuche pour moi sur l’édition 2012…. Mais l’édition 2013  en a décidé autrement :

14H: Début de la mise en grille, tour de mise en place, hymnes, présentation et procédure de départ : type 24H du Mans, of course !

15H : Le coup de feu est donné, les premiers coups de pédales aussi. Le départ est toujours autant impressionnant vue de l’intérieur, 450 vélos qui partent simultanément à l’assaut de la piste, n’a rien de banal.
Un peu comme l’an passé, je me fais avoir et emporté par le rythme de bons pelotons, mais je me prends au jeu !




Mon objectif cette année est de 600km, ce qui m’impose une vitesse moyenne générale de 25km/h pause comprises. Reste à savoir comment les organiser :
Je pense qu’un arrêt toutes les 2H, me permet de ravitailler suffisamment, et de me détendre 5 à10mn pour mieux repartir. Mes calculs m’indiquent donc une allure de 27km/h sur piste pour un arrêt toutes les 2H. D’autant plus que cette année, j’anticipe sur les douleurs occasionnées par la selle et par la position continue durant 24H. J’emmène donc avec moi 3 tenues de cyclisme, afin de garder souvent des vêtements secs. Aussi, j’applique des bandes de kinésiologie sur les genoux et dans le dos.
Il est 15H45, ma vitesse moyenne est actuellement de 35km/h, beaucoup plus rapide que prévu, mais dans le peloton je ne sens pas trop la fatigue. La météo est similaire aux 24H 2012, un peu de grisaille, beaucoup de vent, mais pas de pluie sur le premier tour de cadran. A mon sens, avec autant de vélos en piste, le plus menaçant reste le vent. Chacun cherchant la roue de son voisin pour limiter son effort, les roues parfois se frôlent.
J’en ferais les frais à la fin de la première heure.






16H, chute au S bleu. Ce virage traverse le vent d’est en ouest, avec une phase de vent de face, ainsi, le peloton se déporte sur la gauche en entrée, en derrière au milieu du S, puis sur la droite en sortie, c’est un joli chassé croisé. Mais dans cette manœuvre, face à une rafale de vent, je touche la roue arrière de mon prédécesseur, ensuite tout va très vite et je me fais heurter, tombant au sol,  avec le vélo me succédant.
Le choc est assez violent, le casque se fend en deux parties (acheté la veille…), la roue semble à la perpendiculaire du guidon (ou l’inverse ?), les cocottes se disent bonjour, les commandes de freins et vitesses sont lourdement endommagés, la pédale gauche est tordue, le dérailleur légèrement tordu également, les vêtements déchirés… Les 2 cyclistes ayant chuté avec moi repartent, moi je ne sais même pas encore si je suis ok, mon corps vibre encore de l'impact, je saigne sur la hanche, à l'épaule, dans le cou, mon casque est fendu en deux, pendant quelques minutes, le moral aussi est détruit, je pense que c'est déjà fini… Puis je repense aux efforts accomplis ces derniers temps, à ces heures d’entrainements, a cet investissement aussi bien personnel que financier, aux sacrifices effectués pour mon hygiène de vie ces dernières semaines ! Ai-je fait tout cela en vain ???


Je me relève, je check mon corps de bas en haut, je détords le guidon et la fourche autant que je le peux, l’assistance me récupère au même moment, m’aidant à finir la distance aux stands.
Dans un même temps, en marchant jusqu’au stand 54, je me remémore ces nombreuses courses de 24H que je suis venu voir tous ces mois je juin dans la Sarthe. Je me remémore toutes ces remontées effectuées sur la totalité de la course ! Il est 16H15 Romain, la course se termine dans 22H45 !!!

Je laisse mon vélo chez mondovélo (que je remercie gracieusement), ils m’informent que les pièces leur manquent, et que les réparations ne seront que ponctuelles… Ok leur dis-je, ça me va comme cela, je suis seul et la montre tourne. En attendant le PC sécurité vient à mon stand faire quelques check sur mon état de santé… Après les check « Monsieur vous devriez voir un docteur », « c’est hors de question, je suis seul et j’ai déjà perdu 1 heure, la montre ne m’attendra pas, et personne ne roulera pour moi », ainsi je poursuis sans l’accord du médecin. Les secouristes ayant été aux petits soins avec moi, le seront encore pour le reste de ma participation, en m’encourageant à chacun de mes passages, je ne peux pas cacher que ça remonte un peu le moral…


17H, je repars avec la hargne et l’envie d’aller au bout, le premier tour de reprise est dure ! Les jambes me lancent, l’épaule me fait mal, le vélo grince, la pédale gauche à du jeu et je dois pousser dans l’axe pour ne pas déchausser…




18H, en sortant des stands une heure auparavant, je pensais repartir pour un relais de 2H… que nenni ! Dans la montée du Dunlop, le cycliste juste devant moi casse sa chaine ! Je roule dessus, PAF le pneu arrière ! Je ne suis pas très loin des stands, j’y descends à contresens (je ne sais pas si c’est autorisé…. ^^), mais j’avais flairé la crevaison cette année, je change donc directement une jante de rechange avec un pneu déjà monté :p ! J’en profite pour ravitailler un peu, en me disant que je vais cette fois ci repartir pour 2H…
19H, depuis la chute, avec les cocottes, les commandes 105 et le dérailleur endommagé, les vitesses ne passent pas toujours aussi bien, parfois elles passent même toutes seules… Il fallait donc bien que cela finisse par dérailler !! Je déraillerais une premières fois devant les stands, une seconde dans le Dunlop. Ainsi je me dis, tant pis, je roule maintenant uniquement sur le grand plateau !
20H il fait frais, je décide de rentrer changer de tenue, histoire de ne pas en plus choper la crève, j’en profite pour remonter ma paire de Mavic Sys-R (ayant monté les Aksiums sur la crevaison), remplir les gourdes, et c’est repartit ! Je repars en trombe, j’essaye de ne jamais m’arrêter très longtemps, car j’ai peur de ne pas pouvoir repartir à froid avec mes blessures.

22H, j’avais pourtant dit que je ne repasserais pas le petit plateau !!! Il a fallu d’une fois de plus, une fois de trop, dans la montée du Dunlop, un clic sur la commande de gauche, la chaine déraille, s’emballe, s’enroule entre le petit plateau et le cadre, et se bloque !!! Je me démène avec mes doigts, jusqu’à en saigner, impossible de la bouger ! Un mec de l’assistance arrive, même constat : Ok je te ramène au stand. Dans la manœuvre j’ai le droit à un tour complet en voiture :D, faible compensation… J’aurais préféré l’Audi qui tourne autour de nous !

Arrivé au stand je me presse devant Shimano, mais du monde attends devant moi… Je m’impose de façon un peu impolie, expliquant que je suis solo et que je ne veux pas laisser le temps défilé, mais le staff fait la sourde oreille, bon, je peux comprendre… Mon tour arrive (30mn depuis le déraillement…) la chaine est effectivement « bloqué », obligation de démonter le bloc pédalier pour la libérer ! Bloqué pour bloqué, j’en profite pour manger quelques pâtes et un steak de soja, je récupère mon vélo, il est 23H, je repars pour… Aussi long que je peux, car j’ai perdu trop de temps (encore une fois).

23H, la relance est dure, une heure d’arrêt complet, les blessures se sont clairement faites ressentir à la reprise ! Crampe dans le mollet gauche (hyper extension du mollet lors de la chute, car je suis resté bloqué dans le cale pied gauche…), inflammation de toute la jambe droite (car je suis tombé du coté droit). Il faut que je me réchauffe me dis je, prends un bon paquet, et mouline !
C’est ce que je fais, sans pour autant mettre mon cœur en zone rouge, je mouline, 8mn de moyenne au tour, c’est 1mn de moins qu’avant mon crash, mais je me ménage pour aller au bout.

1H du matin, après une remontée de la 55ème à la 32ème place solo, ma jambe droite me lance soudainement de grands douleurs inflammatoire du mollet jusqu’à la hanche…
Je baisse le rythme, j’essaye un tour, deux tour, de plus en plus lentement, le 3ème sera le tour de la réflexion, de la rédemption…
Que dois-je faire maintenant ? Arrêter ? Non ? Mais si je continue, qu’est ce que je risque ? Qu’ai-je à me prouver pour aller si loin, et peut être trainer une blessure sur la saison à venir ? Tu as déjà fini le Mans Romain ! Tu es loin de ton objectif mais, tu reviendras plus fort la prochaine fois, après tout, tu as essayé malgré tout ce qui s’opposait à toi cette année… C’est ce que me dit ma conscience.


Il est 1H30 du matin, je suis rentré au stand, je n’ai roulé que 234km, la moitié de l'an passé… Et je dois déclarer forfait suite aux blessures…




Comme l’ont dit beaucoup de pilotes dans ces stands « This is le Mans », sur 24H tellement de choses peuvent arriver, il y a tellement de facteurs difficiles à anticiper, et forcément plus dur à affronter lorsque l’on est seul. On peut se préparer, engager beaucoup de moyens pour y parvenir, mais parfois, un simple fait de course peut changer toute la donne… La course dure 24H, et elle se termine une fois la ligne d’arrivée franchie, le lendemain, à 15H.

J’aimerais remercier mon père, présent pour me supporter, les stands Mondovélo et Shimano pour leur assistance, l’accueil du stand 54, le PS secours du Dunlop venu à mon stand, les enfants que je ne connaissais pas et qui m’encourageaient dans le Dunlop ; et toute l’équipe de CGO.

Les quelques photos Maindru 

Les données GPS Bryton
http://www.brytonsport.com/mapTrackView?id=4116563

Et bientôt quelques prises de la GoPro ;)
Notamment le crash...